vendredi 27 septembre 2013

Devine qui vient dîner ?
Pas de gays à table dans l’Italie de Barilla




La sortie de Guido Barilla a un contexte. L’Italie aujourd’hui. La semaine dernière était discutée, à grand peine, une loi contre l’homophobie. Une loi qui prévoit de ne pas s’appliquer aux organisations qui ont des activités de nature politique, syndicale, culturelle, sanitaire, d’instruction ou encore de religion et de culte, une loi qui doit encore repasser au Sénat. En clair, l’homophobie institutionnelle ne sera ni condamnée, ni condamnable. Nulle part. Pas plus à l’école qu’à l’hôpital, pas plus au boulot qu’à la télé, pas plus celle du syndicaliste que celle de l’assistante sociale !

En Italie, les pédés, les gouines, les trans n’ont aucun droit et leurs couples et leurs familles encore moins. Et nombre de forces politiques font tout pour que ça reste ainsi et qu’au pire – pour éviter toute reconnaissance- on s’en remette au contrat privé passé devant notaire.

Certains, en France, pensent que s’offusquer des propos de Barilla revient à conforter le pouvoir donné aux marques et aux industriels. Mais, Berlusconi comme Guido Barilla, ne sont pas seulement des PDG, ce sont des dirigeants de fait de l’Italie. Et d’ailleurs Barilla pourrait bien succéder à Berlusconi. Traiter par le mépris ou le silence leurs prises de position ne diminuera en rien leur influence.

Quand Guido Barilla fait ses déclarations, il ne positionne pas seulement sa marque, il se positionne aussi dans un débat sur la société italienne où se discutent encore la place des femmes (et sa sortie n’était pas seulement homophobe mais aussi sexiste), la place des pédés et des gouines et il n’avait même pas besoin de le dire, tous les Italiens l’ont très bien compris, la place des immigrés. Or ne l’oublions pas, les violences contre les femmes, comme celles contre les homosexuels et les immigrés, sont en constante augmentation en Italie

Guido Barilla a d’ailleurs été très clair dans ses déclarations, il ne dit pas seulement qu’il n’y aura pas de gays dans les publicités de sa marque de pâtes, parce que ce ne serait pas en adéquation avec l’image qu’il souhaite la voir véhiculer, non il affirme aussi que « le concept de la famille sacrée demeure l'une des valeurs fondamentales de la société »[1].

Alors, sans doute, certaines réactions des gays français sont-elles épidermiques, voire primaires. Mais nombre de pédés et de gouines en Italie auront apprécié de se sentir soutenus.

Et même si Barilla, pense avoir réussi son coup, en diffusant son message aux franges les plus obscurantistes du pays : ils peuvent compter sur lui pour s’affirmer en fervent défenseur de la famille traditionnelle, valeur ô combien sacrée, face aux méchants lobbys qui l’ont obligé à reculer, pour les gays italiens, affirmer haut et fort, que le temps où ils subissaient l’exclusion en silence est terminé, ce n’est pas négligeable.


[1] « Per noi il concetto di famiglia sacrale rimane uno dei valori fondamentali dell'azienda. La nostra è una famiglia tradizionale. Se ai gay piace la nostra pasta e la comunicazione che facciamo mangeranno la nostra pasta, se non piace faranno a meno di mangiarla e ne mangeranno un'altra. » http://parma.repubblica.it/ Venerdì 27 Settembre 2013

mardi 24 septembre 2013

Pourquoi nous devons mener la bataille de la PMA, épisode 1


PROCRASTINATION, subst. fém. Littér. Tendance à différer, à remettre au lendemain une décision ou l'exécution de quelque chose. Synon. ajournement, atermoiement.



Il y a maintenant un peu moins d’un an, le 21 novembre 2012, l’invraisemblable clause de conscience inventée par François Hollande à propos de l’ouverture du mariage aux couples de même sexe, poussaient quelques centaines de pédés et de gouines à manifester leur indignation rue de Solferino, devant le siège du PS.

Au sortir de cette manifestation, je décidai d’ouvrir un blog pour m’opposer à ma façon aux concerts d’énormités qui accompagnaient la présentation du projet de loi. J’en étais persuadée, l’ouverture du mariage serait une bataille idéologique ; elle serait longue, rude, et les gays devraient compter sur leurs propres forces pour y faire entendre leur parole.

Il me paraissait en outre évident que la tonalité de ces débats conditionnerait la suite du quinquennat. Accepter sans réagir le refus de ce gouvernement d’assumer son propre programme ne pouvait conduire qu’à l’assurance de reculs à venir dans tous les autres domaines (PMA, droit des trans, droit de vote des étrangers, droits des putes, mais aussi droit à la retraite, droits des malades …).

C’est pourquoi, en dépit des insuffisances du texte présenté, sa défense s’imposait. Il devenait au-delà de droits futurs, le thermomètre d’un rapport de force politique. Le symbole de la résistance aux diktats d’une morale conservatrice visant à défendre un ordre hétéropatriarcal, blanc et biologisant.

Les tergiversations du gouvernement sur l’ouverture de la PMA (procréation médicalement assistée) à toutes les femmes relèvent du même registre. Avec ses dérobades successives, il montre une bien pauvre conception de la politique : loin de défendre une volonté de transformation éthique de la société, il ne cesse de céder aux pressions des réactionnaires, les encourageant dans leurs tentatives de contester les droits des minorités.

Avec la PMA, les socialistes nous promettent, comme pour le Mariage, une bataille de longue haleine. Parions que cette promesse-là (la durée), ils la tiendront. Et puisqu’il faudra y revenir, j’ai décidé d’aborder la question par son versant le plus simple, l’égalité des couples.

Concrètement, la PMA recouvre les pratiques d’insémination artificielle et de fécondation in-vitro. Chaque année en France, des dizaines de milliers de couples ont recours à ces techniques et donnent naissance à près de 20 000 enfants.

Concrètement, notre pays, à ce jour, a décidé que seuls les couples hétérosexuels mariés (ou en couple depuis 2 ans) pouvaient accéder à ces pratiques, à condition d’infertilité ou pour éviter la transmission d’une maladie grave.

Cette condition d’infertilité concerne bien le couple et non les individus pris séparément. Il ne s’agit pas de savoir si chacun des membres de ce couple pourrait, en s’associant à un autre partenaire retrouver une fertilité naturelle.

La PMA devrait donc, à tout le moins, être accessible à tout couple infertile, quels que soient le sexe, le genre et l’orientation sexuelle des membres de ce couple ou la cause de l’infertilité.

Décider d’interroger l’orientation sexuelle ou le genre des individus avant de définir les droits auxquels ils ont accès relève purement et simplement de la discrimination.

Et s’il s’agit d’objecter, que dans le cas des couples composés de femmes, il sera nécessaire d’en appeler à une tierce personne, là encore, le seul principe d’égalité doit prévaloir. Soit nous interdisons toute technique de PMA ayant recours à une tierce personne, soit nous l’autorisons pour tous les couples.

Or, même de cette minimale et stricte application du principe d’égalité entre les couples, le gouvernement Ayrault aujourd’hui se défausse.

Pire, il prétend en faire une question de bioéthique. Mais quand la PMA en elle-même est autorisée, la seule question qui est alors posée au CCNE (Comité consultatif national d'éthique), c’est celle de la légitimité des couples non-hétérosexuels et non-cisgenre à y recourir.

Le gouvernement Ayrault a sans doute fait voter l’ouverture du mariage aux couples de même sexe mais il continue d’affirmer que tous les couples ne se valent pas !

Il y a ceux qu’il faut aider dans la construction de leurs familles et ceux qu’on peut condamner au pouvoir de l’argent et à la précarité de la clandestinité aux seuls motifs de ce qu’ils sont.

Face à ce simple constat, la question nous est posée, allons-nous comme le gouvernement, contribuer longtemps par notre silence et notre discrétion, à légitimer cette infériorisation de nos couples ? Cette infériorisation de nos vies ? Notre infériorisation tout simplement.

Rassemblement à l’appel du Collectif Oui Oui Oui
Pas d’égalité, sans la PMA. PS, tiens tes promesses !
Mercredi 25 septembre, 19h : Siège du PS, Paris, rue de Solferino
http://www.ouiouioui.org/



lundi 23 septembre 2013

Lundi d’automne




Certaines rentrées ont la couleur d’un automne prématuré. Plutôt que flamboyantes, plombées du gris de dépressions successives, comme une anticipation d’interminables retraites.

Alors vous avez profité de vos vacances, complété vos provisions de vitamines, aéré vos neurones ? Vous vous êtes gavés de pâtisseries et autres pièces montées ? Parce qu’après une année à se fader du mariage pour tous, se profile tout un programme de batailles d’arrière-garde pour arracher à l’énergie dans les décombres des promesses socialistes quelques avoirs.

Le conservatisme socialiste nous oblige. Rien ne sera aisé. Coincés entre agendas étriqués et ambitions insatisfaisantes, le pessimisme et les divisions nous guettent. Le piège est connu.

Pour autant, nous n’avons pas à renoncer à inventer de nouvelles formes de rapport aux autres.

Quel que soit notre lot d’aspirants à la conformité, chérissons nos particularités, partageons-les et prenons soin les uns des autres plutôt que de nous enfermer dans des querelles stériles.

Il suffit de ne pas renoncer. Les victoires d’aujourd’hui sont nées de combats que tout le monde nous prédisait perdus.