Confrontés
à la violence que représentaient la dernière parade de La Manif pour tous et l’écho complaisant que lui lui ont
offert (et continuent de lui offrir) les médias, nombre d’homos se sont interrogés
les dernières semaines sur la façon d’y répliquer. Comment exprimer le refus de
baisser la tête ? Comment faire entendre la brutalité de la récusation de
la légitimité de nos existences qui prétend se dissimuler sous des atours
policés ?
Nous
avons été quelques-uns à émettre une espérance. Celle d’une implication
collective à donner une dimension visible et conséquente à la 18ème
marche de l’Existrans programmée pour ce 18 octobre.
Cependant
ne nous y trompons pas, cet appel relayé de voix en voix, par des militants,
dans nos média et nos associations ne saurait se réduire à une simple
opportunité de calendrier.
De
cette marche, nous devons faire un tournant. Attester concrètement de notre
mobilisation pour les plus vulnérables d’entre nous au sein de la communauté
mouvante que nous prétendons constituer.
Il
est question là de notre capacité à discerner les urgences, tout en continuant
à nous battre sur de nombreux fronts et temporalités. Il est aussi question de
nous relever et de joindre nos forces dans une contre-attaque régénérante.
A
mon sens, si nous devions définir collectivement une priorité, la question de
l’accès au changement d’état civil libre et gratuit, devrait s’imposer sans
aucune hésitation, tant les conséquences de ses modalités de contrôle qu’elles
soient judiciaires, médicales, économiques ou sociales sont immédiatement
mortifères.
Nous
devons nous donner les moyens de notre opposition commune à une violence
structurelle et cela passe par une démonstration visible.
Et
s’il faut préciser les enjeux de cette marche en tant que spécifiquement pédé
ou gouine, il faut le dire clairement cette manifestation est nôtre.
Non
pas qu’il faudrait la capter à notre profit, y inscrire nos revendications
propres, y brandir notre visibilité, ce qui reviendrait à précisément effacer
celle que les trans et Intersexes, en dépit d’obstacles innombrables (et
parfois même posés par nous, pédés et gouines) tendent par leurs engagements à
construire et faire vivre.
Samedi,
nous devons faire nombre. Nous comporter comme des renforts acceptant de se
placer sous une bannière que nous n’avons pas à écrire. Commençons par
reconnaître que les trans et les intersexes sont en première ligne, plus
exposés encore que nous ne le sommes, à la violence et aux discriminations.
Notre seul mot d’ordre doit être le soutien. Notre apport, l’amplification
d’une légitimité autonome du mouvement trans et Intersexe.
Pourtant,
les raisons que nous avons à nous impliquer dépassent la seule solidarité. Tout
simplement parce que dans les combats que livrent les trans et les Intersexes,
ce sont également nos conditions de vie qui se jouent.
Ceux
et celles qui pensent n’êtres pas directement intéressés dans cette lutte, ou
seulement de loin, se leurrent.
Les
freins, les refus, directs ou dilatoires - y compris ceux qui se veulent
emprunts de bienveillance - de faire droit aux revendications des trans et des
Intersexes s’inscrivent dans une résistance à l’autonomie de la personne dans
son autodétermination. Il est ainsi frappant de constater combien, même chez
ceux qui se présentent comme nos alliés et prétendent incarner le progressisme
face aux renoncements du Parti socialiste, perdure en réalité une lecture
normative des problématiques qui les empêche d’aller au bout de la remise en
question des mécanismes structurels qui produisent les discriminations.
Les
résistances à la volonté de desserrer l’étau des prédéfinitions imposées et
rigides de ce que doivent être un homme et une femme (et nécessairement l’un ou
l’autre) sont innombrables et multiformes. Il y a encore loin de la réalisation
du célèbre slogan féministe « mon corps, mon choix ».
Savoir
si nous voulons une société qui enferme dans des carcans qui préexistent à nos
parcours, à nos vies et à ce que nous choisissons d’en faire est affaire
commune. Une société qui favorise l’imagination, se nourrit des expressions
singulières et les respecte ou s’arqueboute sur un modèle qui se prétend
immuable et universel et dans la réalité viole jusqu’à nos corps et nos
esprits.
samedi 18 octobre 2014, 18ème Existrans,
la marche des personnes trans et intersexes
et des personnes qui les soutiennent,
au départ de Stalingrad à 14 h
http://existrans.org/
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