vendredi 27 juin 2025

Faire des attaques de la Marche des Fiertés, un moment de clarification re-constituant

 Face aux attaques d’une coalition de toutes les droites et extrêmes-droites, sans distinction d'orientation sexuelle, la première des tâches qui nous incombent, me semble-t-il c’est de nous attacher à identifier un moment politique.

Après des années, non de dépolitisation, mais de tendance globale à une droitisation molle du mouvement LGBT dans ses expressions les plus mainstream, nous voici confrontées à un moment de clarification et d’accélération du fascisme qui concerne évidemment ici en 1er lieu les TPG, queers et non binaires mais s’inscrit dans un contexte plus global de répression de tous les mouvements antiracistes et mouvements qui défendent des alternatives, des résistances et des alliances solidaires et s’opposent à la politique d’État de criminalisation généralisée de la solidarité avec la Palestine

L’une de nos premières réponses devrait être de pas participer à minimiser et masquer les enjeux et de refuser l’usage de termes qui en participent comme polémiques, provocations, etc.

A nous de nous saisir de ce moment et d’assumer que cette période de normalisation droitière molle de l’expression LGBT se termine pour entrer dans une phase d’alliances offensives entre tous les réacs.

Qui ne s’embarrasse plus de masquer que ces alliances se font contre les minorités politiques au sein des TPG, queers et non binaires et d’abord contre les racisés.

Il s’agit d’assumer les ruptures nécessaires avec un projet d’hégémonie excluante basée sur le racisme, l’islamophobie, la transphobie et la défense d’une économie libérale et martiale.

L’unité à tout prix n’a pas de sens. Et c’est un mythe.

La lutte contre le sida par exemple, contrairement aux ré-écritures à postériori, ne s’est pas construite sur une unité de masse des LGBT mais au contraire sur des ruptures, des affrontements internes, parfois violents, et des rapports de force.

D’ailleurs il a fallu attendre 2025, pour que cette lutte apparaisse, à travers la représentation d’un t-shirt d’Act Up, dans une affiche officielle d’appel à la Marche.

Des ruptures qui passent par rendre visible ce projet qui prétend se dissimuler derrière une novlangue euphémisante inversant tous les termes, inclusivité, universalisme, laïcité, etc. mais se réclame d’une visibilité qui ne saurait être que blanche, cis, valide, et islamophobe, excluant tous les autres, personnes et corps, du champ et avec pour seul projet de s’insérer dans la respectabilité des dominants.

Il n’y a aucun hasard si l’offensive a été lancée par le Beit Haverim, c’est à dire un groupe gay qui se revendique en défenseur des politiques d’Israël et s’opposant aux dénonciations du pink washing. Et si cette offensive se développe dans un moment de justification de la complicité et d’adhésion d’État à une politique raciste, coloniale et génocidaire.

Ces derniers mois se sont multipliées les tentatives d’instrumentalisations des luttes féministes, queer et LGBT contre les mouvements de solidarité avec la Palestine.

Comme ces tentatives n’ont pas réussi à faire taire toute résistance, nous voyons se développer des politiques de répression de nos expressions autonomes,

Tentatives d’imposer par les forces de l’ordre, la présence de collectifs sionistes et d’extrême droite dans les manifestations.

Tentatives d’interdire des marches comme la marche féministe radicale du 7 mars dernier.

Parfois mixte des deux : la menace de l’interdiction de la Marche des Fiertés de Paris aurait été brandie après de l’AFP selon le Huff Post par l’entourage de Retailleau pour faire accepter la présence des fachos d’Eros.

Tentatives d’interdire les centres-villes, marquant ainsi un retour de la symbolique de l’exclusion de la Cité, comme à Dijon en invoquant des risques de «troubles à l’ordre public», un ordre nécessairement hétérosexiste !

Chantages aux subventions de la part du gouvernement et de la droite, aux associations féministes par la voix d’Aurore Bergé, et donc il y a quelques jours aux assos LGBT par celle de Valérie Pécresse.

Si ces offensives se développent, c’est que l’entreprise de domestication raciste, autoritaire et sécuritaire du mouvement LGBT a en partie échoué comme son enrôlement de force en soutien de la politique coloniale et génocidaire d’Israël.

Leur remarquable élan d’effroi ne dit qu’une chose, à quel point ces droites réactionnaires et racistes se sentent frustrées d’un début de contestation de leur volonté d’imposer leur politique de la Marche des Fiertés qui fonctionnait plutôt pas trop mal pour eux.

Toutes ces droites et ext-droites s’y engouffrent parce qu’elles n’ont en réalité jamais adhéré à nos luttes.

Il faut rappeler que sexisme, homophobie, transphobie, racisme, validisme, ce ne sont pas seulement des discriminations mais des systèmes de domination et d’exploitation qui sont au cœur du système économique capitaliste avec pour clé de voute le racisme.

Et qu’à défaut de pouvoir s’opposer frontalement – pour l’instant - aux luttes, dans un 1er temps, elles tentent de les instrumentaliser et discipliner, d’en modifier la nature, de s’en poser en opérateurs et d’empêcher la constitution de fronts solidaires.


Pour ce qui concerne les LGBT, nous avons l’expérience des politiques de répression, non seulement nous n’avons pas cédé face à elles mais il est temps de se rappeler que notre identité politique est construite de nos révoltes victorieuses face aux répressions.

Restons solides, refusons de nous laisser isoler et désolidariser des combats des réprimés. Nous le savons d’expérience, c’est avec autonomie mais par les constructions de front politique solidaire entre militants de gauche, syndicaux et travailleurs, les mouvements de jeunesse, les antiracistes, les décoloniaux et queers et féministes que nous avons mené nos luttes et conquis des droits, pour nous mais aussi pour tous.

Refusons de céder aux intimidations.

Oui, comme l’Inter LGBT s’est efforcée d’élaborer une réponse collective en ce sens,

il faut refuser la présence du groupuscule Eros et ses affidés dans la Marche.

Oui, il faut s’opposer à l’ingérence de l’État dans nos luttes et à sa complicité dans l'offensive des ext. droites de destruction des outils qui s'opposent à eux, même modérément, qui chaque jour s'affirme un peu plus.

Mais Eros ne doit pas devenir l’arbre qui cache la forêt.

Les fachos vont marcher dans cette Pride et ce n’est pas une nouveauté, des racistes, des islamophobes, des coloniaux, des transphobes, des flics de tous genres, organisés ou en ordre dispersé, sans causer des exploiteurs et des extractivistes …

Eros n’en sont pas les seuls représentants, seulement ceux qui revendiquent des étiquettes sans équivoques.


Et après tout, cette offensive pourrait provoquer l’inverse de ce qu’elle poursuit.

Provoquer un retour du mouvement LGBT à ses fondements. Détruire les systèmes de hiérarchie des vies.

En refusant le pacte qui nous tolère exotiques, inoffensifs et domestiqués, n’affectant pas l’hétérosexisme et se rangeant au service du nationalisme et du colonialisme blanc.